La question du vous - Dominique RUBINI

La question du vous
J'ai toujours vouvoyé mes élèves. Cela en sans doute étonné beaucoup ... Il arrivait qu'en fin d'année, certains m'en demandent la raison. Je leur répondais sans problème en leur disant que j'avais commencé à enseigner à 19 ans et que mes élèves  ,au lycée à l'époque, étaient plus âgés que moi, que c'était pratique et que j'en avais gardé l'habitude... C'est tout à fait vrai, mais en réalité, c'est plus complexe Cet usage que j'ai toujours perçu "en décalage", et cela, dès le départ, car dans la période post 68 la mode était plutôt à gommer la séparation prof élève, repose en fait sur un choix instinctif de distance. J'avais en effet besoin,pour fonctionner,de cette limite posée, pour d'ailleurs mieux la transgresser, quand je les appelais mes cocos,mes chatons,mes agneaux et autres éléments du bestiaire ou pour y revenir avec emphase dans certaines circonstances par un" messieurs ou mesdemoiselles" ... Peut-être aussi le désir de les traiter "comme des grands", le souci de faire grandir étant à mon sens essentiel dans notre métier... Ou bien la marque finalement d'une forme d'égalité, en dépit du statut différent de l'adulte face à l'enfant , dans un jeu à construire pour obtenir une réussite. Tout a toujours très bien fonctionné ainsi... Je pense que les élèves savent parfaitement s'adapter à des usages, à des styles différents ( C'est peut-être là aussi d'ailleurs un apprentissage à la vie future) pourvu qu'ils se sentent respectés en tant qu'individus.