Accueillir - Alexis GERARD

Accueillir
Chaque début d'année, le coordonnateur de l'ULIS passe dans les classes de 6° pour parler aux élèves de l'ULIS et des élèves qui y sont accueillis. Une façon aussi d'accueillir les nouveaux élèves au collège ; collège qui a une ULIS.
Présentation de l'ULIS aux élèves des classes du collège
Synthèse de l'intervention
L'Unité Localisée d'Inclusion Scolaire regroupe 10 élèves qui ont un handicap intellectuel ou de grandes difficultés à apprendre. Cela ne se voit pas forcément. Vous serez certainement amenés à discuter avec certain d'entre-eux et vous ne vous apercevrez pas qu'ils ont un problème. Pour d'autres ça se voit tout de suite. La peur, le dégoût sont des sentiments tout à fait normaux. Vous êtes capables de les dépasser pour vivre une rencontre avec eux.
L'ULIS est une chance pour eux. Sans cela, ils seraient scolarisés en établissement spécialisé. Là, ils ont la chance de pouvoir fréquenter un collège et des jeunes de leur âge qui ont une scolarité ordinaire, normale. Dans leur vie, c'est « énorme ».
C'est une chance pour eux et pour vous aussi. Je peux témoigner que 18 années de travail quotidien avec « ces enfants-là » m'ont changé. J'ai beaucoup appris et j'apprends encore beaucoup d'eux, sur eux et sur moi. Ils ont développés des qualités différentes des nôtres, différentes de celles nécessaires pour « s 'en sortir » dans notre société. Là où l'on nous dit sans cesse d'aller vite, eux vont lentement. C'est un exemple parmi d'autres. Il y en a qui courent vite d'autres moins vite ; il y en a qui apprennent vite , d'autres moins vite. Lorsqu'on se promène dans la nature à pied, on ne voit pas les mêmes choses que si on fonce à moto. Ces enfants-là, ces jeunes ont souvent une autre façon de voir les choses, une autre façon « d'être au monde » même. Les côtoyer, parler avec eux, aller à leur rencontre c'est peut-être pouvoir vivre cette aventure-là, cette aventure de la différence ; la différence qui enrichit. Vous vivez les différences déjà tous les jours avec les personnes que vous rencontrez. L'amitié et la vie de couple permettent cette expérience-là également. Mais là, les différences sont parfois plus importantes.
Tout ce que je viens de dire c'est ce qu'on appelle la solidarité. Vous en avez certainement déjà entendu parler en cours d'éducation civique. Pour préparer cette intervention, j'ai regardé dans le dictionnaire. Je regarde souvent dans le dictionnaire, on y apprend des tas de choses (c'est mon côté instituteur...!). Moi, je croyais que la solidarité c'est quand on aidait quelqu'un : et bien pas du tout ! D'après le Larousse Classique c'est : dépendance mutuelle. Je ne m'attendais pas à ça ! On a tous besoin les uns des autres. C'est autre chose que l'amour ou l'amitié, c'est la solidarité. Bon, que les personnes handicapées aient besoin de nous, on arrive encore à l'envisager mais l'inverse... Et bien si ! Quand on regarde les grandes avancées de l'humanité, on se rend compte qu'elles ont souvent été possibles par la protection des plus fragiles : Homère était aveugle, Toulouse-Lautrec, polyhandicapé et Beethoven était sourd ! Protéger les plus faibles c'est le contraire de la loi du plus fort.
Il n'y a pas de condition à la solidarité. Lorsque je suis en voiture et qu'une personne est en panne, je m'arrête pour l'aider. Je ne regarde pas s'il est noir, blanc, jaune ou rouge, je ne me renseigne pas pour savoir s'il est gentil ou si c'est un salaud. Je m'arrête et je propose mon aide, c'est tout.
On ne vous demande pas d'aller proposer votre aide dès que vous les verrez. Les Chinois disent : « Pourquoi tu veux m'aider ? je ne t'ai rien fait ! ». Être aidé c'est pas toujours une position très agréable. Ce qu'on vous demande c'est, au minimum, le respect, et ça, ça ne se discute pas. Ils sont très heureux dans ce collège, n'allez pas tout gâcher par des moqueries ou de la méchanceté... Le minimum c'est le respect, après si des affinités apparaissent, des amitiés, ça c'est votre histoire, entre eux et vous.
L'école en France accueille tout le monde. Vous avez de la chance de vivre dans un pays qui a pour principe la laïcité : l'accueil de tous et de chacun. C'est une belle idée... Là, lors de cette rentrée, nous vous accueillons tous et chacun d'entre vous, en particulier. Tout au long de votre scolarité, vos instituteurs, vos professeurs et tous les adultes qui sont ici portent une attention particulière à chacun, pour vous aider à grandir, pour vous aider à devenir ce qui vous voulez devenir. Il y a des pays où ce n'est pas le cas. Dans certains pays, les filles n'ont pas le droit d'aller à l'école, dans d'autres il faut avoir telle religion. Vous avez beaucoup de chance...
Alors là, au collège de La Craffe, on fait un pas vers plus de laïcité en accueillant des élèves handicapés. Voilà, on se pousse un peu pour leur faire de la place... On peut tous en être fier !
Alexis GERARD coordonnateur d'ULIS